
Photo de profil Google + de François Hollande ©Benjamin Boccas
Tous les écoliers de France sont à présent en vacances, mais le gouvernement lui, ne profite pas encore de ses 14 jours de repos au programme et prend part à une actualité politique française bien agitée malgré l’arrivée de la chaleur et du beau temps (en théorie en tout cas). Pour cet été 2014, Démosthène 2012 a su user de son réseau pour vous faire profiter des carnets de bord (ou de vacances) des plus importantes personnalités politiques de France et du monde, afin de vous faire vivre au plus près l’actualité … en s’autorisant parfois ça et là quelques ajustements à sa sauce.
Le blog commence sa série de l’été en vous faisant découvrir en exclusivité le journal de bord de François Hollande, à la page du 9 Juillet.
6h53: Je me réveille et trouve Ségolène endormie à mes côtés. Je m’étais promis de ne plus la revoir, mais à chaque fois que je veux rappeler Valérie pour lui supplier de revenir pour ne pas avoir l’air bête devant les Obama, j’entends le klaxon de sa boîte à sardines électrique, suivi d’un grand « Ouh ouh François ». Je lui ai déjà accordé la chasse aux loups, l’étalement de la hausse des tarifs de l’électricité et le péage de transit poids lourds: que me veut-elle de plus ? J’ai appelé Christophe [Barbier, NDLR] pour qu’il titre « L’emmerdeuse » dans son journal, et je lui ai encore réduit son budget de 400 millions d’euros d’ici 2017. Si elle ne comprend pas avec ça …
8h10: J’arrive en retard au bureau, car Manuel a pris mon scooter, il paraît qu’il avait besoin de se faire livrer des pizzas. J’ai dû montrer ma carte d’identité à l’entrée de l’Elysée car personne ne m’a reconnu (encore). Heureusement maintenant, tout le monde a reçu la photo du gouvernement avec ma tête entourée en rouge, j’espère qu’ils se souviendront de moi demain.
10h: C’est le conseil des ministres. J’ai pas mal dormi car Manuel m’interrompt tout le temps quand je commence à parler. Cazeneuve voulait interdire les djihadistes de partir de France, je ne connais pas les détails, mais Montebourg avait l’air très content, lui qui s’alarme toujours des forces vives qui quittent la France. Fabius a dit qu’il fallait un dialogue et une solution politiques en Ukraine. Pour l’Ukraine, tout le monde veut une solution européenne, la dernière fois que j’ai essayé d’appeler M. Poutine, Angela est venue elle-même me couper le téléphone. Moi je veux bien une solution européenne, et même aider le type qui va la faire, mais personne n’a su me donner son numéro pour l’instant. En même temps, comme je n’ai plus le téléphone …

Les ministres du gouvernement Ayrault, après le premier conseil des ministres, le 17 mai 2012. (Maxppp)
11h: Fabius a rappelé son soutien à « l’opposition modérée » en Syrie, alors je l’ai pris à part à la fin pour lui demander s’il voulait qu’on leur envoie des armes. Il m’a fait les gros yeux et m’a dit d’arrêter avec ces idées, que les rebelles étaient bien plus contents avec des discours qu’avec des armes. J’ai regardé par la fenêtre tout penaud et j’ai vu Ségolène partir avec sa Mia, j’ai eu des frissons. Pour me changer les idées, j’ai écris des tas de discours jusqu’au déjeuner pour qu’on puisse bombarder Bachar avec.
14h30: Le Foll a beaucoup parlé de la conférence sociale pendant sa conférence de presse (j’aime bien la regarder, comme ça je connais les sujets même en ayant dormi). Peut-être un peu trop, car j’ai fait des cauchemars dessus, j’ai rêvé qu’après les syndicalistes, c’est moi qui partait et que les patrons pouvaient faire tout ce qu’ils voulaient, qu’ils avaient supprimé les 35 heures et que Martine m’attendait devant chez moi avec une barre de fer. Je me suis réveillé et je suis allé jusqu’à Bercy avec le scooter que Manuel m’avait rendu: heureusement, Michel était là pour me rassurer et me dire que la finance, c’était notre amie.
15h30: Pendant que les autres s’amusent à l’Assemblée, je lis mon courrier. Il y a encore ce Paul Bismuth qui m’écris des menaces de mort, en me disant qu’il reviendrait pour me descendre. Mon service de sécurité a réussi à le retrouver la semaine dernière mais apparemment, on ne peut pas le placer en garde à vue car il en a déjà fait une. J’ai bien voulu le mettre sur écoute, mais ça non plus on n’a pas le droit.
16h: Je vais prendre un café au bar d’en face. Je dois avoir l’air fatigué parce qu’un scout m’a proposé de m’aider à traverser la rue. C’est sûrement la faute des lunettes, mais je ne peux pas les enlever, c’est Ségolène qui me les a offertes. Je n’ai même pas eu le temps de finir mon café que Delphine Batho est arrivée pour que je la reprenne dans le gouvernement. Mais c’est Jean-Marc qui l’a virée et moi je respecte Jean-Marc car il est courageux. Elle est repartie furieuse, j’espère qu’elle ne va pas faire quelque chose de bête, comme refuser de voter le budget de la Sécu.

© Denis Rouvre / Modds, pour le New York Times
17h: J’apprends qu’un certain Carlos da Silva a changé ma réforme en mettant le Limousin avec l’Aquitaine. C’est dommage, j’avais passé beaucoup de temps avec mes feutres et mon papier Canson à dessiner l’ancienne. Quand c’est moi qui rassemble des régions, tout le monde me tombe dessus. Le Guen, il a rayé mon scooter, et les Bonnets rouges ne sont pas contents non plus, vu ce qu’ils ont fait aux portiques écotaxe, je n’ose plus retourner en Bretagne.
18h: Manuel m’appelle furieux: j’ai oublié de lui apporter son discours de clôture de la conférence sociale. Il a dû improviser et s’est mis les patrons ET les syndicats à dos. Je ne suis pas passé loin du licenciement aujourd’hui. Du coup, je n’ai plus que trois jours pour lui écrire son discours de l’université d’été du PS, et il a intérêt à être parfait ! La sanction aurait pu être plus dure, mais je sais qu’il y en aura d’autres.
20h30: Pour me remonter le moral, je fais semblant de téléphoner à Netanyahou, mais ça ne trompe personne, car tout le monde est déjà parti. Pourquoi c’est toujours moi qui doit faire des heures sup’ ? Pour compenser, je dis à l’AFP que je « condamne fermement les agressions » contre Israël: ça me donne l’air puissant, ça me rappelle le bon temps du Mali.
21h: Je quitte le bureau par la porte de derrière: encore une dure journée. Je longe les murs, mais ça ne manque pas. Au carrefour, Ségolène est là et m’attends avec un grand sourire. Et dire qu’il me reste encore trois ans …